Vigdis Herrera est la présidente co-fondatrice de la société Les Petits Mandarins, une entreprise qui développe des applications ludiques et accessibles à tous pour favoriser l’apprentissage des langues.
Pouvez-vous nous présenter votre activité ?
Nous développons des applications initialement en chinois avec Les Petits Mandarins. Depuis peu, nous avons créé une nouvelle marque qui s’appelle Globe Speaker sur laquelle on peut trouver des applications pour apprendre d’autres langues. Actuellement il y a l’anglais, le français langue étrangère, l’italien et le russe. Et dans les mois à venir l’arabe, le hindi et l’espagnol, et plus de langues par la suite.
Votre approche est plutôt ludique…
Notre application est ludique, c’est la base de notre travail parce qu’à partir du moment où c’est sous forme de jeux, on a envie d’y revenir.
On peut passer du temps à apprendre sans avoir le sentiment d’apprendre et ça, c’est quand même quelque chose de très important. Quel que soit l’âge, ça veut dire qu’on peut passer du temps, prendre du plaisir sur un outil, acquérir et travailler des connaissances, développer ses compétences sans vraiment avoir le sentiment de le faire. Donc sans que ce soit une expérience « douloureuse » et difficile, cela se fait tout seul et naturellement.
C’est ce qu’on cherche à développer avec nos applications.
Globalement, on se retrouve avec des gens qui arrivent en quelques mois, généralement 3 à 9 mois, à acquérir l’équivalent de 11 années d’apprentissage à l’école.
Comment est venue l’idée ?
J’ai commencé mon apprentissage du chinois à 11 ans en cours à distance et ça a été un gros échec. Malgré ma passion et mon envie, je n’ai pas réussi à l’apprendre de cette façon. J’ai fait cinq ans de chinois par correspondance pour ma LV2 jusqu’au bac, j’ai quand même eu mon bac malgré cette note, et je suis partie vivre en Chine pendant 1 an en famille d’accueil dans un lycée chinois. C’est là que j’ai appris la langue.
Ensuite, j’ai obtenu des diplômes en chinois en pédagogie et en didactique, et c’est ainsi que je suis devenue professeure des écoles, spécialisée dans l’enseignement du chinois. Je l’ai enseigné toutes ces années à des publics variés d’enfants et d’adultes, et c’est ça qui m’a donné l’idée, l’envie et le goût de créer cette société avec mon associé, pour partager ma passion, la diffuser et la rendre accessible.
J’ai réalisé au fur et à mesure de mon parcours, quand je donnais des cours particuliers et que j’étais professeur des écoles, que j’avais en face de moi des élèves qui étaient dans la même difficulté que moi. L’enseignement du chinois est quelque chose de relativement récent et qui est encore vu comme élitiste, donc il n’a pas vocation à être simplifié, et ça, c’est quelque chose qui ne me plaisait pas.
Il n’y a rien d’élitiste à apprendre une langue…
Vigdis Herrera
À mes yeux, à partir du moment où l’on transmet une passion, qu’on a envie de partager et d’apprendre, quelle que soit notre origine, nos difficultés et nos particularités, on doit pouvoir avoir accès à ce savoir. Il n’y a rien d’élitiste à apprendre une langue et c’est pour ça aussi qu’on a créé la société, parce que c’était un message qu’on voulait faire passer, qui nous semblait très important : « Quand on veut, on peut. »
Avez-vous été accompagnés ?
En 2018, nous avons rejoint le BIC de Montpellier et un accélérateur qui s’appelle WeSprint toujours sur Montpellier, deux ans après la création de la société. Au moment où on s’est dit : « On s’éclate à faire ça, quittons nos emplois respectifs et lançons-nous à fond dans la société. »
L’avantage était d’apprendre, de se professionnaliser, de découvrir le métier d’entrepreneur qui n’était pas encore le nôtre, et de rencontrer des gens. Et puis d’apprendre de ces gens qui nous entourent, des expériences des uns et des autres, et c’est un excellent choix qu’on a fait à cette époque, qu’on ne regrette pas un instant.
Vous êtes en pleine levée de fonds, en quoi cela consiste ?
Une levée de fonds consiste à aller convaincre des investisseurs qui partagent nos valeurs – parce que c’est important – étant donné qu’on va céder une partie de notre société aux investisseurs en échange d’une certaine somme d’argent.
Il faut aller trouver les bonnes personnes, les convaincre, matcher et voir si, sur les prochaines années, on va être absolument d’accord sur le développement de l’outil que nous contrôlions jusqu’à présent seuls. Et ça, c’est quand même une étape assez difficile parce que cela veut dire qu’on laisse notre bébé grandir et d’autres personnes en prendre possession, prendre des décisions à son sujet, on est beaucoup moins dans le contrôle de ce qu’on faisait jusqu’à présent.
Des conseils pour lancer un projet ?
La chose la plus essentielle c’est de croire en vous, de croire en ce que vous avez à défendre, ce que vous créez.
Vigdis Herrera
Toutes les personnes qui vous diront que ce n’est pas possible et qui vous expliqueront par A+B que ça ne l’est pas, c’est leur limite. Cela fait partie de leurs limites à eux et ils ont peut-être de bonnes raisons de les avoir, mais ce n’est pas une raison d’en faire les vôtres. Et ça, c’est très important pour moi, la chose la plus essentielle c’est de croire en vous, de croire en ce que vous avez à défendre, ce que vous créez et puis vous entourer des personnes qui vont être en mesure de croire autant en vous que vous-même.
J’ai beaucoup entendu que c’était plus difficile quand on était une femme, une mère, pourtant mon principal moteur ce sont mes enfants. Je n’imagine pas un seul instant que j’aurais réussi à faire ça si ils n’avaient pas été là.
Photo de couverture Vigdis Herrera copyright Grizette.