On croule sous les déchets plastiques ! C’est de cette constatation et avec l’envie d’inverser le cours des choses que Flora Joly et Céline Lapeyre ont créé R&D Concept. Elles nous expliquent pourquoi et comment elles agissent pour un développement durable.
Pouvez-vous nous présenter R&D Concept ?
Céline Lapeyre : En 2018, on a créé un projet qui s’appelle EffetMer. C’est la création de montures de lunettes de soleil à partir des déchets plastiques récoltés sur le littoral ou en nature en Occitanie.
Flora Joly : En 2021, on a créé la société R&D Concept pour valoriser les déchets d’une entreprise en ressources, en matières premières secondaires, pour une autre entreprise. C’est-à-dire que l’idée est d’impulser l’économie circulaire.
D’où est venue l’idée ?
Flora Joly : L’idée initiale, on avait vraiment envie de créer quelque chose avec les piliers du développement durable : l’écologie, le social et l’économie. On vient toutes les deux du social. On avait déjà travaillé un peu sur des projets environnementaux, mais il nous manquait vraiment une structure qui réunit ces trois piliers en une entreprise.
Céline Lapeyre : Notre idée était de montrer qu’on pouvait apporter de la valeur à ses déchets et créer de nouveaux produits au lieu de puiser dans les ressources de notre environnement. C’est pour ça qu’on a créé EffetMer puis R&D Concept.
Flora Joly : En fait, au tout début, on a voulu créer un article à partir de déchets, un article de l’entreprise de la mode, parce que l’entreprise de la mode est la plus polluante au monde après celle du pétrole. Donc on voulait vraiment apporter une réponse à cela. Quand on a regardé un peu autour de nous les déchets qu’il y avait, le premier déchet dont on commençait à parler beaucoup dans les médias était les déchets dits sauvages. Les déchets plastiques sauvages qui sont récupérés en mer, dans la nature, et par rapport à ces déchets, on s’est dit : « Ce serait super de pouvoir en faire un produit durable et design ». Donc on a commencé à faire des analyses et après quelques années de recherche et développement, assez rapidement, on a commencé à dessiner des premières idées de produits et finalement, on est arrivées sur la lunette de soleil. Pourquoi ? Parce que le déchet plastique était la matière qui correspondait le mieux à ce produit, la lunette de soleil. Donc la matière nous a amené le produit.
Que proposez-vous avec R&D Concept ?
Céline Lapeyre : On propose aux entreprises et aux collectivités de les accompagner à travers des formations et des conseils en économie circulaire pour leur permettre de réduire leur impact. Et on leur propose également de mettre en place des filières de valorisation des déchets liés à leur activité. Pour aller jusqu’au bout, c’est de leur permettre de mettre au point, de valoriser ces déchets et de pouvoir les retrouver dans leur entreprise. D’éco-concevoir de nouveaux produits avec eux.
Quels sont vos parcours ?
Céline Lapeyre : Je suis éducatrice. J’ai dix ans passés dans le social et j’ai un parcours dans l’éducation populaire. J’ai travaillé auprès d’associations. Donc je ne suis pas du tout issue de la plasturgie ou du monde de la lunetterie, et c’est tant mieux.
Flora Joly : J’ai un double Master en Anthropologie et Aménagement du territoire. Pareil, j’ai un parcours qui est plutôt dans le social, dix ans d’expérience dans des associations d’éducation populaire ou en institution, en mairie, sur des projets collectifs.
Quelles difficultés avez-vous rencontrées ?
On ne venait pas du tout du secteur et, en plus, on était deux femmes.
Céline Lapeyre – R&D Concept
Céline Lapeyre : On a eu du mal, au début je pense, à être légitimes quand on allait rencontrer le monde de l’industrie. Voilà ! On ne venait pas du tout du secteur et, en plus, on était deux femmes. Et souvent on a eu des réflexions que des hommes n’auraient pas eues. Ça a alimenté le combat et le fait de dire avec détermination : « Il faut qu’on prouve quelque chose, que c’est possible ». Et aujourd’hui, on est fières du parcours qu’on a réalisé parce qu’on est légitimes et on n’a plus ce genre de réflexions.
Flora Joly : Aujourd’hui, on a des ingénieurs qui s’adressent à nous sur du conseil et en fait notre point de vue, qui est un peu atypique et qui est très polyvalent, a sa particularité parce que l’on n’a pas cette déformation de l’expertise technique. Et, du coup, on peut des fois dire : « En termes d’impact écologique, ce n’est pas cohérent de faire comme ça, même si techniquement c’est plus logique. Dans cette cohérence d’impact écologique, il ne faudrait pas penser de cette manière-là et pourquoi vous n’essayez pas ça ? »
Des conseils pour lancer un projet ?
Nous, on est deux et vraiment ça change tout.
Flora Joly – R&D Concept
Céline Lapeyre : Le premier serait l’acceptation. Accepter que des fois, les choses ne se déroulent pas du tout comme on l’avait prévu, accepter nos limites et accepter certaines situations qui sont désagréables et inconfortables.
Flora Joly : Nous, on est deux, et vraiment ça change tout. On voit les entrepreneurs qui sont seuls et, honnêtement, je n’aurais pas fait ce projet sans Céline. On est vraiment très complémentaires, mais il y a des moments où on n’a plus d’énergie, même si on est entourées et qu’on a des gens autour de nous, ce n’est pas pareil. Quand on est deux dans le même bateau, on rame ensemble et quand il y en a une qui est fatiguée, il y a l’autre qui rame et vice versa.
Photo de couverture Flora Joly & Céline Lapeyre – R&D Concept copyright Grizette.