Avec une équipe de guides conférencières, Marie-Sabrina a créé Pass’enGers pour mettre en valeur le patrimoine gersois. Loin des sentiers battus, elle développe une approche innovante des visites touristiques.
Découvrez l’interview dans son intégralité :
Pouvez-vous présenter votre parcours ?
Je m’appelle Marie-Sabrina Bonnaffé, j’ai 38 ans. J’ai grandi dans le Vaucluse, j’ai entrepris des études en Histoire, en Histoire de l’Art, en Management Culturel. Ce qui m’a amenée à l’issue de ce cursus, à travailler au sein de plusieurs « pays d’Art et d’Histoire » comme chef de projet. Ce sont des collectivités qui mettent en valeur le patrimoine au service des touristes mais aussi de la population locale. C’est dans ce cadre-là que je suis arrivée dans le Gers en 2009. En 2015, j’ai sauté le pas. Je me suis lancée dans la création de Pass’enGers en compagnie d’une équipe de guides conférencières professionnelles ancrées localement que je connaissais bien, et qui avaient toutes envie de se lancer sur un projet commun de mise en valeur du patrimoine gersois pour partager notre passion avec le public.
Comment avoir une approche innovante ?
On a inventé un certain nombre de visites insolites qui partent du ressenti du public par le biais de jeux notamment, de jeux sensoriels qui permettent aux publics de sentir un lieu avant même qu’on leur donne des explications et qu’on entre dans l’histoire du site. On a eu envie aussi de développer des randonnées culturelles, c’est une autre manière d’appréhender un territoire parce que finalement on le vit physiquement, corporellement, avant de l’aborder intellectuellement. Même si on ne va pas s’engager sur de la randonnée sportive – en trois heures on ne fait que cinq ou six kilomètres – nous, c’est le plaisir de découvrir un lieu par les sens et un aspect plus convivial que permet la marche ensemble notamment.
Association de femmes : volonté ou hasard ?
Alors Pass’enGers, ce ne sont que des femmes mais c’est un peu le hasard des rencontres qui a fait qu’on a créé cette entreprise sur un collectif de femmes. Hasard de rencontres, de compétences. Il est vrai néanmoins que dans le métier de guide, il y a beaucoup plus de femmes que d’hommes. Ça n’empêche pas d’évoluer au fil des compétences – la mixité est plutôt une bonne chose dans une entreprise. Là, nous sommes en train de travailler par exemple sur des projets de jeux vidéo ou d’applications mobiles autour du patrimoine. Les partenaires que nous avons rencontrés sont des hommes – de très grande qualité – et nous espérons pouvoir travailler avec eux sur ces projets-là.
La rencontre avec d’autres professionnels est primordiale car ils nous apportent un autre éclairage.
Vous bénéficiez d’un accompagnement ?
C’est vrai que j’ai fait le choix d’entrer, pour la création de l’entreprise, au sein de la coopérative d’activités et d’emploi qui s’appelle Kanopé. C’est une mutualisation d’un outil de travail, d’une certaine manière, pour des entrepreneurs de différents horizons. Mais ce n’est pas que la mutualisation de nos charges comptables et administratives ! C’est aussi tout un accompagnement dans la création de la stratégie de l’entreprise, dans la recherche des supports de communication les plus pertinents, des pistes de développement qu’on n’aurait peut-être pas pensé à explorer seules. L’avantage d’une telle coopérative aussi, c’est le fait qu’il y ait des horizons extrêmement différents – des graphistes, web-masters, créateurs de jeux vidéo, traducteurs… – qui sont finalement autant de partenaires potentiels avec lesquels on peut travailler en toute confiance. Et puis au-delà de la coopérative, j’ai eu aussi l’occasion de travailler avec le réseau Soho Solo, un programme de la Chambre de Commerce et d’Industrie du Gers destiné à accompagner les travailleurs indépendants qui s’implantent dans le département. Notamment pour éviter de les laisser dans l’isolement parce que cela peut aussi être un handicap au moment de la création d’entreprise de se retrouver isolée avec beaucoup de choses à gérer en même temps sans savoir par quel bout commencer. Finalement, mettre en réseau les différents entrepreneurs indépendants permet de relativiser les problèmes que l’on a dans le quotidien – parce qu’on a tous les mêmes dans la création de l’entreprise ! – et d’être mis en lien avec d’autres horizons professionnels qu’on n’aurait pas pensé à solliciter. La rencontre avec d’autres professionnels est primordiale car ils nous apportent un autre éclairage. C’est autant d’échos qui peuvent stimuler notre créativité.
Des conseils pour celles qui voudraient se lancer ?
Alors je conseillerais entre autres de prendre le temps de poser les choses par écrit. C’est vrai qu’on a souvent beaucoup d’idées, et des idées qui viennent par bribes. Les poser par écrit permet de les clarifier, les affiner, et de pouvoir établir un argumentaire quand on va voir des partenaires potentiels, différents clients. Au final, on va alimenter aussi ce document du retour qu’on a eu à l’issue de ces échanges. Cela permet de formaliser ses idées et de définir ce qu’on veut faire, ou pas – parce que c’est presque aussi important, ce qu’on ne veut pas faire dans une entreprise !
C’est important que la famille, les amis, aient bien conscience de ce qu’est le lancement d’une entreprise, et sachent accompagner.
Ce qui me semble important aussi est d’être bien entourée, accompagnée sur un plan professionnel – il existe beaucoup d’organismes comme les coopératives ou les Chambres consulaires. Ne pas être isolée car on peut vite se sentir submergée par la quantité de tâches à faire au quotidien. Aussi bien au lancement de l’entreprise qu’à échéances régulières. Ne pas hésiter à solliciter ses pairs aussi pour avoir des idées. Être entourée, c’est aussi par ses proches. C’est important que la famille, les amis, aient bien conscience de ce qu’est le lancement d’une entreprise, et sachent accompagner. Dans les coups de blues – car ça arrive hein, à l’issue d’un entretien qui ne s’est pas forcément déroulé comme on l’avait prévu – c’est important de savoir aider l’entrepreneur à prendre un peu de recul, regarder les choses sous un autre angle et peut-être à rebondir de manière différente.
Quelles sont les prochaines étapes ou défis à relever ?
C’est d’une part continuer sur l’existant – là on a déjà lancé pas mal de pistes avec l’ensemble des acteurs touristiques et culturels en matière de saison culturelle -, d’accueillir aussi des séjours sur le département. Et puis on a envie de pousser un peu plus loin le développement innovant pour imaginer par exemple le « Pokemon Go » de demain qui sera autour du patrimoine du Gers et de tous ses atouts gastronomiques entre autres.