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[ LIVRE ] Dépêche-toi, ta vie n’attend plus que toi ! Le premier roman de Sandrine Catalan-Massé

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Journaliste pour la presse féminine, people et parentale, Sandrine Catalan-Massé s’est spécialisée en santé et psychologie. Originaire de Toulouse, 17 ans sur Paris, elle s’installe à Montpellier en 2006. Après la naissance de son fils, elle écrit trois ouvrages pratiques sur l’éducation positive, l’alimentation et le sommeil des enfants, qui lui permettent de sortir de l’écriture journalistique formatée. Sandrine laisse ainsi exploser son imagination. Le besoin d’un format plus grand ne la quitte pas, elle signe son premier roman « Dépêche-toi, ta vie n’attend plus que toi ! », paru le 8 mars 2018 aux Éditions Eyrolles.

Dépêche-toi, ta vie n’attend plus que toi ! : l’envie de se dépasser

Ce roman feel-good met en scène Stella, une Montpelliéraine mère au foyer confrontée à l’abandon soudain de son mari. Un choc qui la mène, tout au long du récit, à dépasser ses doutes et angoisses, comme l’agoraphobie dont elle souffre. Sous sa trame apparemment simple, le roman aborde des sujets qui résonnent en chacune d’entre nous : la famille, l’amour, le couple, la rupture, le dépassement de soi, la place des femmes dans la société. Bien qu’il ne s’agisse pas d’un roman de développement personnel, son subtil jeu psychologique pousse à la réflexion et à une forme d’introspection. Car nous avons toutes un peu de Stella. Rencontre avec Sandrine Catalan-Massé qui, à travers ce premier roman réussi, nous booste sacrément le moral !

De quelle manière votre expérience de journaliste psycho vous a-t-elle aidée dans l’écriture de ce roman ?

Déjà, je ne savais pas si je savais écrire de manière littéraire. Je ne sais toujours pas d’ailleurs. Mais quand j’ai commencé les premiers chapitres, mon écriture journalistique – assez vive et cadrée – apportait un rythme intéressant. On peut toucher les gens avec des phrases simples et percutantes. Pour moi, c’était très important de rester proche des femmes, de toutes les femmes. Le côté psycho, je l’ai découvert en écrivant. Il faisait partie de moi, il m’a nourrie. Ce regard sur le monde que l’on a après une dizaine d’années de psychanalyse, n’est plus jamais comme avant. On est plus sensible aux gens, à ce que les autres peuvent dire, leurs manières…

J’ai fait un livre pour émouvoir, avec mes mots, mon niveau… cela m’a animée tout le temps.

Concernant l’agoraphobie, je l’ai vue comme le frein aux désirs de Stella. Je pense qu’on est tous un peu agoraphobes, cela peut être assez universel. À un moment donné, on peut suffoquer dans un tram ou dans la file d’attente d’un supermarché. C’est venu aussi sûrement de mon expérience de journaliste psycho pour Femme Actuelle où l’on traitait tous les domaines avec tous les experts du monde. En plus, c’est porteur d’humour dans le livre aussi.

Votre héroïne Stella est une femme au foyer qui ne vit que pour son mari et ses enfants. Elle doit apprendre à se débrouiller seule pour la première fois après que son mari ait quitté le domicile conjugal avec la carte bleue. Pourquoi avoir choisi ce sujet ?

Stella c’est aussi quelqu’un de mon entourage. Une amie, femme de psy, a été plaquée par son mari. Elle n’est pas agoraphobe et n’a pas vécu la même trajectoire que Stella, mais ça me paraissait très intéressant. D’autres amies vivaient la même chose. Une femme qui se fait quitter, c’est universel – les hommes aussi du reste, mais en tant que femme, j’ai préféré choisir une héroïne, c’est plus facile. Mais là ce n’est pas banal : elle est femme de psy, il la plaque. Ça se prêtait bien pour un roman.

Je crois aussi qu’il y a une part d’inconscient. Maintenant seulement je réalise que j’ai peut-être écrit cette histoire pour les femmes de ma famille. Ma mère et ma grand-mère étaient des femmes au foyer qui rêvaient plus leur vie qu’elles ne la vivaient. Mais c’est moi qui interprète cela, peut-être qu’elles étaient très bien à leur place. Toute petite déjà, je savais que ce n’était pas le schéma que je voulais pour ma vie. Et je ne l’ai pas du tout eu. Même si maintenant je suis mariée, j’ai un enfant. J’ai tout fait à l’envers. Je crois que le cœur du livre est là.

Comment avez-vous construit le personnage de Stella ?

Il y a plein de choses qui ont construit cette femme qui, effectivement, est universelle : des fantasmes, les femmes de ma famille, des amies, des récits d’experts que j’ai pu rencontrer. Je voyais Stella dans ma tête comme dans un film. J’ai d’abord construit sa personnalité au début du livre, son enfermement. Et après, qu’est-ce qui pouvait arriver ? La cassure pour qu’elle puisse changer sa vie ? C’était que son mari la quitte. Je l’ai ensuite placée dans des lieux où elle ne s’était jamais trouvée : Pôle Emploi, l’avocate, le supermarché, l’hôtel où elle doit travailler, un jeune homme. Elle est vraiment sortie de son univers et j’ai trouvé ça assez facile après. Ça marchait chapitre par chapitre.

Stella a arrêté ses études de psychologie pour élever ses enfants. À votre avis, qu’est-ce qui pousse une femme à renoncer à sa carrière pour se consacrer à son foyer ?

C’est comme un destin contrarié en fait. Mais si je le présente comme ça, j’ai l’impression de dire que ce n’est pas bien de fonder une famille. Or ce n’est pas le cas. Je pense qu’on ne peut pas tout être en même temps. Il y a des choix à faire dans la vie. J’ai réussi à les faire. J’ai eu une vie professionnelle, puis j’ai voulu construire quelque chose de plus personnel en mettant un peu de côté ma carrière. Mais tout en continuant à travailler, sinon je serais morte. J’aurais pu rester rédactrice en chef, par exemple. Mais on ne rentre pas à 18h, dans un hebdo c’est plutôt minuit. Donc si on choisit sa carrière, on n’est pas avec son enfant. Et si on est avec son enfant, on n’est pas forcément au boulot. On rêve toutes d’être cette femme parfaite qui assure dans tous les domaines. Assurer dans tout peut-être, mais pas simultanément. Si on arrive à se réaliser au cours de sa vie, construire sa vie professionnelle, familiale etc., au bout, on est complète.

On rêve toutes d’être cette femme parfaite qui assure dans tous les domaines.

Stella a renoncé par facilité. Ça l’arrangeait d’avoir un homme psychiatre sur qui elle pouvait se reposer. Elle aurait cette maternité dont elle rêvait et pourrait s’enfermer dans son agoraphobie. Je pense que chacun y a trouvé un intérêt. Et au bout de quelques années, comme dans tous les couples, cet équilibre ne marche plus. Un couple c’est un rééquilibrage constant. Je voulais montrer cela aussi. Au fil des années, c’est facile de déteindre l’un sur l’autre. Au bout d’un certain temps, on ne sait plus à qui appartiennent les désirs de l’un ou de l’autre. Parfois, on peut suivre un désir pour faire plaisir à l’autre, et on se perd, ou on atténue ses propres envies. L’important dans un couple, ce n’est pas d’être collé à l’autre, sinon on ne se voit plus. C’est ce que j’ai appris en psychanalyse. C’est ce que Stella avait oublié. Elle avait tellement peur d’être abandonnée, qu’elle collait aux désirs de ses enfants et de son mari.

Dans votre roman, Stella est confrontée à la vie active malgré elle. Plus généralement, quels sont les motivations d’une femme au foyer à changer de vie ?

Je n’en sais rien. Déjà est-ce qu’elles ont osé le faire ? Je ne peux pas répondre pour toutes ces femmes. Je n’ai pas fait d’étude sociologique sur elles. Je me demande s’il n’y a pas à un moment donné un point de rupture dans leur vie, qui les poussent à changer quelque chose.
C’est peut-être tomber sur un roman ! Excusez-moi de dire cela, mais un roman peut changer la vie d’une femme. Je ne dis pas le mien. [rires] Mais cela arrive souvent qu’au travers d’une histoire, une femme trouve le courage ou l’impulsion de changer quelque chose. Alors cela ne veut pas dire tout changer, tout révolutionner. Parfois c’est s’inscrire à un cours de danse africaine parce qu’elle a toujours voulu faire ça, de la peinture etc. Un je-ne-sais-quoi qui reconnecte à quelque chose de plus personnel.

Une femme peut arriver à un âge où, une fois qu’elle a élevé ses enfants, elle a besoin d’exister par elle-même et non en tant que mère ou épouse ?

Je pense que c’est effectivement tout cela, à ce moment-là. Certainement parce que moi aussi j’arrive à cet âge, bien que mon fils soit encore jeune et que ce n’est pas ce que je vis car avec mon mari, nous sommes dans la communication, les projets de chacun sont respectés par l’autre. Mais je pouvais le ressentir. Disons qu’avant 50 ans, on est dans l’obligation de réussir pour prouver quelque chose. À soi, à sa famille, ou aux autres. Il faut réussir socialement, professionnellement, dans le couple. Quand on a élevé ses enfants, qu’on a fait carrière, on arrive à autre chose de plus personnel où l’on écoute ce qu’il y a en soi, sans avoir besoin de plaire aux autres. On se reconnecte à des désirs et des envies qui sont plus sincères. Si on veut vraiment le faire – parce que je ne pense pas que toutes les femmes veuillent le faire –, on peut être attentive à ce qui nous anime vraiment.

[…] Quelles-sont les étapes nécessaires ?

Certaines femmes peuvent se demander pourquoi je raconte cela, car elles sont très bien chez elles. Je les respecte aussi parce que faire le choix de rester chez soi avec ses enfants, c’est aussi le sens d’une vie aujourd’hui.
Y-a-t-il des étapes pour arriver à s’épanouir ? Ce sont les étapes de la vie. C’est presque physiologique. Je ne peux parler que de Stella. Je l’ai trouvée tellement universelle. À un moment donné, je me demandais si elle plairait à tout le monde, si toutes les femmes pourraient s’identifier à elle. Parce qu’elle est dans un milieu qui n’est pas connu de tous. Mais quand je vois les femmes qui viennent me voir en dédicace et sur Facebook, c’est toutes les couches sociales. Et ça, j’adore !

En lisant le livre, j’aimerais que les femmes se disent : « Quel est mon frein dans la vie ? Qu’est-ce que je voulais faire quand j’étais adolescente ? Et qu’ai-je fait finalement ? ». Juste se poser ces questions, identifier ce qui les anime encore et puis partir sur ce désir ou un autre.

Le dépassement de soi, passe-t-il forcément par un choc émotionnel ?

Pour Stella, oui je pense. Sans ce choc, elle ne serait jamais sortie de sa chrysalide. Ça peut paraître bizarre de dire qu’une agoraphobe doit se forcer, mais c’est très facile de rester dans ses symptômes, qui deviennent ensuite des prétextes. Ils peuvent nous encourager, quels qu’ils soient, à rester dans notre zone de confort. Si on les met de côté par moments, on peut avancer pas à pas et se renforcer. Plus on avance, plus c’est une victoire, et plus on se renforce. La confiance en soi grandit. C’est ce qui arrive à Stella. Elle se renforce alors qu’elle est terrorisée. Il ne faut pas avoir peur de ses peurs. Souvent, ce sont de fausses peurs que l’on arrive à dépasser.

Stella semble dépendre du regard des hommes. Comment sortir du cercle vicieux de la « dépendance affective » ?

On vit toujours par le regard des autres. C’est obligé. Pour Stella, le regard que portent les deux hommes sur elle, est tout à fait différent de celui de son mari. Thomas sert à son émancipation sexuelle. Il me fallait parler de l’émancipation sexuelle de cette quadra. Elle rattrape le temps perdu peut-être sur une jeunesse qu’elle n’a pas eue, qu’elle n’a pas dévorée. Mais c’est aussi la superficialité, la jeunesse. Il n’est pas tendre, il n’y a pas d’affect, c’est physique et elle n’a pas l’habitude. Stella va quand même se frotter à quelque chose qu’elle ne connaît pas. Elle pourrait avoir un sacré sentiment d’abandon ! Mais elle ne l’a pas, elle se protège. Nicolas, c’est plutôt lui qui la colle. Elle n’est pas sous son charme au début. Donc Stella ne dépend pas des hommes. Sinon, à ce moment-là, elle dépend autant de Djamila et de tous ces gens qu’elle croise. Mais on dépend tous plus ou moins de notre entourage. On serait triste sans ces regards – bienveillants ou pas. C’est assez complexe… Je ne dis pas que je règle tout là-dedans.

J’imagine que vous n’allez pas en rester là. Quels autres sujets avez-vous à cœur de traiter ?

On me demande souvent si je prévois une suite. Alors non. Même si la fin est ouverte, pour l’instant, il n’y a pas de suite prévue. J’ai envie de passer à un autre registre, un autre univers qui me vient déjà. Je ne dis pas quoi sinon ça va me bloquer. Ce n’est pas pour faire des secrets. C’est que si je le dis, je vais me sentir obligée de l’écrire. [rires]

Quel message souhaitez-vous faire passer aux femmes qui vous lisent ?

On a toutes en nous quelque chose qui ne demande qu’à vivre à nouveau et qui nous définit vraiment. Après les enfants, après le couple, c’est peut-être bien de se réinterroger sur tout cela. Se remettre en connexion avec ce qui nous animait quand on était ado ou jeune femme. Si on n’a plus les mêmes désirs qu’à 20 ans, ce n’est pas grave. On se pose la question de ce qu’on est réellement. Il y a des rêves qui n’attendent que nous.

La phrase d’Oscar Wilde, que j’ai lue et trouvée à la fin de l’écriture, le résume : « Soyez vous-même, tous les autres sont déjà pris ». C’est le plus beau cadeau qu’on puisse se faire.

On n’a pas de rôle à jouer. Nos différences, qui l’on est, font notre richesse. Et ça, quand on le comprend, on attire des gens différents. Personnellement j’en suis là. Je ne l’explique pas. Je souhaite à toute femme de laisser vivre cette chose, parce que quand ça s’ouvre, c’est super. Mais pas besoin forcément de tout révolutionner, pas besoin de plaquer son mari et partir faire le tour du monde !

Est-ce qu’un homme pourrait vivre ce que Stella a vécu ?

J’en suis persuadée ! Un homme a encore plus d’obligations à réussir socialement, plus que les femmes je trouve. Un homme peut très bien embrasser une carrière et puis réaliser à un moment donné qu’il s’est trompé. J’aurais très bien pu écrire un livre comme ça. D’ailleurs, j’ai des lecteurs aussi. En dédicace, j’ai discuté avec un monsieur autour de l’histoire de Stella et il m’a parlé de sa vie. Il a lui aussi connu un point de rupture. On lui avait donné six mois à vivre. À partir de là, il a revu toute l’organisation de sa vie. Il s’est fait soigner par les plantes. Dix ans après, il est toujours vivant. On arrive parfois à un moment donné de son parcours où un point de rupture fait tout changer. Cela donne une nouvelle vision de la vie qui pousse à se dépasser.

Résumé :
43 ans et toute une panoplie de vêtements, Stella vit dans un bel appartement de Montpellier où elle élève ses deux enfants de 16 et 17 ans. Ses journées s’écoulent entre ménage maniaque et shopping sur le Web, à attendre le retour de ses ados chéris et surtout celui de César, son psychiatre de mari qu’elle vénère plus que tout au monde. Seules ses consultations secrètes de psy online et les visites de Lucille, sa meilleure amie, ébouriffent son quotidien de femme au foyer. Car Stella, affligée d’une agoraphobie et d’angoisses envahissantes, ne met quasiment plus les pieds hors de chez elle…
Alors le jour où César se volatilise sans un mot d’explication mais avec sa carte de crédit, le monde si parfait de Stella s’écroule. Abandonnée par son mari, lâchée par ses ados et ignorée par sa meilleure amie, Stella va devoir se débrouiller seule, franchir son périmètre de sécurité et rattraper sa vie.
Parviendra-t-elle à dépasser ses angoisses, sa peur de l’autre, à trouver un travail ? Une chose est sûre, le parcours sera semé d’embûches, mais aussi d’heureuses surprises et de belles rencontres…

Dépêche-toi, ta vie n’attend plus que toi ! de Sandrine Catalan-Massé, Éditions Eyrolles. 16 €

Photo de couverture copyright Christophe Catalan.

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