vendredi 29 mars 2024
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Parité : l’Égalité Femmes-Hommes en marche ?

Où en est-on de la parité ? Grizette a souhaité présenter son analyse de la loi du 4 août 2014 pour l’Égalité réelle entre les Femmes et les Hommes.

Jamais une ministre n’avait donné une telle visibilité aux Droits des Femmes. Jamais un texte de loi sur le sujet n’avait abordé la question avec une vision aussi transversale. Son champ d’application atteint une ampleur inédite.
Dès son arrivée au Ministère, – une ministre de plein exercice aux Droits des Femmes et à l’Égalité, une grande première depuis… 1995 – Najat Vallaud-Belkacem a pris de la hauteur et a saisi l’importance d’une approche globale. Elle a ainsi nommé un référent Égalité dans tous les ministères afin que chaque projet de loi, chaque action, chaque réflexion, soit envisagé, soit conçu en tenant compte de l’angle égalité femmes/hommes. Grande première également, cette femme d’état a su mobiliser les collectivités et faire remonter l’information de la base, en sollicitant notamment les déléguées régionales aux Droits des Femmes et à l’égalité –peut-être parce qu’elle-même a été conseillère régionale et générale.

La parité existe déjà

Cette approche se traduit par un texte de loi « pour l’égalité réelle entre les hommes et les femmes » qui s’efforce de donner des outils à notre société pour une organisation plus égalitaire, pour une gestion plus équilibrée de la famille, de l’éducation des enfants mais aussi de l’économie avec par effet dominos des répercussions à tous les étages de la société. L’objectif étant de ne pas se couper des compétences, de l’intelligence et donc de la capacité de création de richesse de la moitié de la société. Pour atteindre l’égalité, il faut agir simultanément sur tous les fronts, de la sphère familiale à la sphère professionnelle, en passant par l’école, les instances sportives, politiques, économiques… Partout la parité doit être la règle. Des conseils d’administration des entreprises aux assemblées des CCI et des chambres d’agriculture. L’esprit de cette loi veille à une application réelle des textes dans la vie quotidienne car il faut rappeler que dans les textes, la parité existe déjà.

Ce texte comporte quatre grandes parties :

  • Les dispositions relatives à l’Égalité entre les femmes et les hommes dans la vie professionnelle.
  • Les dispositions relatives à la lutte contre la précarité.
  • Les dispositions relatives à la protection des personnes victimes de violence et à la lutte contre les atteintes à la dignité et à l’image en raison du sexe dans le domaine de la communication.
  • Les dispositions visant à mettre en œuvre l’objectif constitutionnel de parité.

Il faut rappeler que dans les textes, la parité existe déjà.

Et pour s’assurer de l’application des mesures, les sanctions s’égrainent. Afin de développer l’égalité professionnelle, l’interdiction d’accès aux marchés publics et aux délégations de service public s’instaure pour les entreprises ne respectant pas la loi sur l’égalité professionnelle – à commencer par l’obligation faite aux entreprises de plus de 50 salariés de produire un rapport de situation comparée entre les femmes et les hommes.
Comment le contrôler ? Coline Erlihman, Déléguée Régionale aux Droits des Femmes et à l’Égalité du Languedoc-Roussillon nous éclaire. « Les entreprises ne devront pas avoir fait l’objet d’une condamnation sur les dispositifs concernant l’égalité professionnelle depuis au moins cinq ans. L’application des obligations dans ce domaine sera vérifiée au moment d’octroyer un marché. » Elle ajoute que les Inspecteurs du Travail s’aguerrissent sur le sujet avec le temps. Pour exemple, en 2013, en Languedoc-Roussillon, des campagnes de contrôle systématique ont été effectuées auprès des entreprises de plus de 300 salariés puis ensuite auprès de celles de plus de 50 pour s’assurer que les entreprises ont produit un rapport de situation comparée. La suppression des écarts de rémunération et des différences de déroulement de carrière s’inscrit désormais à l’ordre du jour des négociations d’entreprise chaque année. La banque publique d’investissement facilitera l’accès des femmes aux prêts et aux financements en fonds propres.

(…) pour que la parité évolue, il faut que les femmes soient présentes dans toutes les instances de la politique.

Dans la sphère privée, une prestation de substitution sera versée par la CAF dès le premier mois de pension alimentaire impayée ; le conjoint violent devra quitter le domicile conjugal.
On note également les mesures d’accompagnement de l’IVG qui visent à renforcer et protéger ce droit en commençant par un remboursement à 100 % de l’acte et une revalorisation de son tarif de 50 %. De plus, la loi autorisant l’IVG se voit reformulée. Ainsi, on remplace l’autorisation au recours à l’IVG pour la femme enceinte « que son état place dans une situation de détresse » par l’IVG autorisée pour la femme « qui ne veut pas poursuivre une grossesse ». Le Conseil Constitutionnel avait été saisi par 60 sénateurs UMP hostiles à cette nouvelle formulation, mais les sages l’ont validé.
Le congé parental est lui aussi réformé afin d’être mieux partagé. Exemple pour le 1er enfant : aux 6 mois actuellement ouverts s’ajouteront 6 mois supplémentaires pour le 2e parent qui le souhaite. Cette réforme devrait s’accompagner de la création de 275 000 solutions d’accueil dont 100 000 places en crèche.La parité aux élections cantonales

Des mesures dans tous les domaines dont il reste à présent à évaluer l’impact sur notre société. Rendez-vous donc après les élections départementales – ex cantonales – puisque pour la première fois, deux conseillers départementaux seront élus dans chaque canton et que le binôme devra obligatoirement comporter un homme et une femme pour chaque département ! Une grande première qui s’appliquera aussi aux suppléants et ne manquera pas de changer le visage de ces assemblées, qui ne comptaient que 14 % de femmes en 2011 ! Cette modification imposée par la loi du 17 mai 2013 est appuyée par la loi pour l’égalité réelle qui prévoit notamment de doubler les pénalités à l’encontre des partis politiques ne respectant pas la parité aux élections législatives.
Un pas important, car tous les mouvements féministes s’accordent à reconnaître que pour que la parité évolue, il faut que les femmes soient présentes dans toutes les instances de la politique. Et si possible à leur tête ! La loi prévoit donc la parité dans les assemblées locales entre la tête de l’exécutif et le premier adjoint ou vice-président. Bref, l’égalité réelle serait-elle en train de se mettre en marche ?

Nous avons perdu une ministre de plein exercice mais laissons le temps à Pascale Boistard, Secrétaire d’État aux Droits des Femmes, de faire appliquer la loi. Wait and see !


Et la Région dans tout ça ?

Coline Erlihman
Coline Erlihman©DR

La politique de l’État s’applique en région, pour le Droit des Femmes comme pour tous les autres sujets.
En Languedoc-Roussillon, Coline Erlihman occupe la délicate fonction de Déléguée Régionale aux Droits des Femmes et à l’Égalité. C’est elle qui, sur le terrain, veille à l’application de la loi, relayée dans chaque département par une chargée de mission. Elle, qui a été chargée de monter au créneau lors de l’expérimentation des ABCD de l’égalité dans l’Hérault –abandonnés depuis pour cause d’immaturité de la société française.

« Nous voulons repérer les freins dès l’école. »

Aujourd’hui, notre région est à nouveau pilote dans la mise en place de l’éviction du domicile du conjoint maltraitant et de la prestation de substitution dès le premier mois de pension alimentaire impayée, Coline Erlihman reprend donc son bâton de pèlerin. Ses actions sont multiples et variées.
Ainsi, dans le cadre du Programme Opérationnel National Emploi Inclusion du Fonds Social Européen 2014-2020, l’État a lancé le 8 octobre 2014 un appel à projets régional « Promouvoir et favoriser l’égalité et la mixité professionnelles entre les femmes et les hommes« . Piloté par la DIRECCTE, en partenariat avec la Délégation Régionale aux Droits des Femmes, cet appel s’adresse à tous. « Plusieurs dates ont été fixées pour la remise des projets, car nous voulions que les porteurs puissent peaufiner leurs études. Les prochains dépôts pourront avoir lieu le 30 mai, puis le 30 septembre. Dans le même temps, nous venons de signer une convention pour entrepreneuriat au féminin avec la Caisse des Dépôts et Consignations et les Chambres Consulaires afin de mutualiser et de promouvoir l’ensemble des dispositifs visant à favoriser l’accompagnement de l’entrepreneuriat au féminin. Nous voulons repérer les freins dès l’école. Des fonds de garantie dédiés à l’entrepreneuriat féminin font partie du dispositif », se réjouit la déléguée.

La DRDF se penche également sur le secteur agricole afin de trouver des mesures qui facilitent l’articulation vie professionnelle/vie privée sur les exploitations. Des pistes sont explorées notamment pour trouver des solutions d’embauche pour permettre aux femmes de prendre leur congé maternité.

Par ailleurs, la déléguée mise depuis de nombreuses années déjà sur la sensibilisation et l’ »essaimage » des bonnes pratiques car elle refuse la stigmatisation. Elle est ainsi à l’initiative d’un réseau interentreprises. Le réseau LégalIE réunit en son sein des sociétés innovantes dans le domaine managérial qui prennent plaisir à travailler ensemble dans une ambiance de co-construction, de créativité, dans un but d’innovation sociétale, pour permettre l’accès des femmes à tous les postes. LégalIE est force de proposition. Il offre un espace d’échanges des bonnes pratiques, notamment en direction des PME. Vaste programme.

Droits des Femmes et parité

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