
Entre réaliser des films et devenir maman, Léa Fehner n’a pas envie de choisir. Et c’est en allaitant son bébé que la jeune réalisatrice nous a parlé de son second long-métrage, Les Ogres.
Une péniche et un chapiteau : voilà les deux images que Léa Fehner garde de son enfance dans la région toulousaine. En effet, la réalisatrice du flamboyant Les Ogres, sorti le 16 mars dernier au cinéma, a longtemps vécu sur une péniche avec ses parents, acteurs de théâtre itinérant (ils dirigent l’Agit, à Toulouse, et c’est leur histoire qui lui a inspiré le film).
Grande cinéphile et passionnée d’écriture, Léa ressent à 18 ans « le besoin de prendre un peu de distance » et part étudier le cinéma à Nantes (Ciné-Sup), puis en Belgique (INSAS), avant d’intégrer en 2002 le département scénario de la prestigieuse Fémis, à Paris.
Quatre ans plus tard, la jeune femme obtient son diplôme avec les félicitations du jury. Le scénario très abouti sur lequel elle a planché pendant toutes ces années intéresse rapidement plusieurs producteurs. Qu’un seul tienne et les autres suivront, long-métrage étonnamment maîtrisé sur l’univers carcéral qui réunit Reda Kateb, Farida Rahouadj et Pauline Étienne dans les rôles principaux, sort en 2009 et reçoit le prestigieux prix Louis-Delluc du premier film. Un parcours sans fautes !

Un film hybride entre théâtre et cinéma
Pour sa seconde réalisation, Léa Fehner change de registre : « J’avais envie d’un cinéma de tribu et d’un film lumineux. Je voulais parler de ces ogres de mon enfance qui sont à la fois de grands amoureux et des gens qui prennent toute la place, de leur liberté et de leur absence de peur pour faire des choix de vie un peu à la marge. »

Au casting de ce film tourné en Aquitaine et en Languedoc-Roussillon, elle a associé quelques acteurs habitués à la caméra tels que Adèle Haenel, Lola Dueñas ou Marc Barbé, à des comédiens de théâtre comme… ses parents, qui apparaissaient déjà dans Qu’un seul tienne et les autres suivront.


Mais pourquoi avoir laissé passer autant de temps (6 ans) entre les deux films ? « Tout simplement parce que je suis une femme et que j’ai eu deux enfants ! » répond la réalisatrice de 34 ans, qui a testé deux méthodes sans trouver de recette magique : « J’ai eu mon premier enfant après avoir fait mon premier film, alors que pour le deuxième j’ai tout fait en même temps… Mais c’est fatigant ! » Elle ajoute : « J’ai aussi eu besoin de temps pour réinventer ma pratique. Je voulais rendre les choses joyeuses, même en parlant de deuil et de couples qui se déchirent. »
Pari réussi : le vent de liberté et la folie douce qui flottent sur Les Ogres en font un film à part, une vraie bouffée d’air frais !
Les premiers spectateurs ne s’y sont pas trompés puisqu’au mois de février, le film a reçu le très convoité Big Screen Award (Prix du public) du Festival international du film de Rotterdam. Prix que Léa Fehner est allée chercher… avec son bébé !